Tangkoko était l’une des étapes de notre voyage en Sulawesi que nous attendions avec impatience. Nous qui sommes fan de jungle et d’animaux. Après tout ce que l’on a pu lire sur ce parc, on avait qu’une hâte c’était de partir à la découverte de ces espèces endémiques. Mais malheureusement, le joli cadre qui ressort de toutes ses histoires n’est pas aussi rose et aussi beau que la réalité. On vous raconte notre expérience dans le parc de Tangkoko, ou plutôt dans le business touristique qu’il est devenu.
Une étape tant attendue de notre voyage
Comme on vous le dit plus haut, nous attendions avec impatience cette étape. Nous avons découvert ce qu’est la jungle au Pérou, pendant notre trip en Amazonie. Et depuis, dès que nous en avions l’occasion nous partons à la découverte de ce monde à part entière comme nous l’avons fait en Bolivie, en Malaisie et à Bornéo.
Nous ne sommes pas du genre à vouloir voir beaucoup d’animaux. Comme disait notre guide dans la Selva : « c’est la nature qui décide ce que l’on doit voir ou ne pas voir ». Et tanpis, si nous ne voyons pas tous les animaux « promis » au programme. Rien que le fait de les chercher, tenter de les apercevoir sans qu’ils ne nous voient est déjà une aventure en soi.
Comme la plupart de nos guides dans la jungle ont pu faire, si il n’y a pas d’animaux alors nous nous intéressons aux plantes. Car on le sait, la jungle est le plus grand supermaché qu’il soit. On y trouve de quoi se nourrir, s’outiller, se guérir… Mais on peut aussi trouver de quoi se tuer…
C’est un environnement fascinant qui mérite qu’on prenne le temps de le comprendre. C’est donc dans cette optique que l’on partait à la découverte du parc de Tangkoko. Malheureusement, ça ne c’est pas passé ainsi.
Une réalité bien différente de nos attentes
La première chose à faire en arrivant est bien sûr de trouver un toit. Rien de plus simple, juste en face de l’entrée du parc, il y a 5 ou 6 guesthouses. Et toutes proposent les tours dans la jungle. Tout le monde est là pour ça, donc c’est la première chose qu’on vous demande en arrivant : « avez-vous déjà réservé votre tour ? ».
Des prix toujours plus haut
Ensuite question prix, pour une excursion demi-journée (matin ou soir), comptez 200 000 Rp par personne. Et pour une excursion journée (matin et soir), prévoyez 300 000 Rp. À ça, il faut ajouter l’entrée du parc : 100 000 Rp. Donc pour un budget de 400 000 Rp, soit environ 23 €. Quant on fait la conversion, le prix ne paraît pas très élevé pour nous.
Mais quant on sait que le prix de l’entrée pour les locaux est de 5 000 Rp, soit 0,28 € et que l’on vous affirme que sans guide vous ne pouvez pas aller dans la jungle. Là, ça commence à sentir l’arnaque…
Attention, je ne dis pas qu’on devrait payer le même prix que les locaux. Je trouve d’ailleurs ça normal que l’on doit payer plus cher. Mais le fait d’être obligé de payer un guide pour rentrer dans le parc, ça je trouve ça limite. Surtout que maintenant, on sait très bien que l’on est pas obligé de payer un guide… On vous raconte ça plus bas !
Entendre ce que vous souhaitez entendre
Au moment de réserver notre tour, nous sommes renseignés auprès de notre hôte (Tarsius Homestay) pour savoir comment se passait la visite. Si nous allions voir des animaux, combien de temps durait le tour, etc… Nous avions d’ailleurs beaucoup parlé avec ce dernier, qui lui aussi était guide. Et déjà en parlant nous sentions un peu le truc venir. Son discours changeait en fonction de ce que l’on pouvait dire.
Il nous dit, par exemple, que si on le souhaite, on peut toucher les animaux. On a directement exprimé un refus, justifiant que nous n’aimons pas faire ceci pour le bien des animaux. Et instantanément, il a changé de discours : « oui, moi non plus je n’aime pas ça. Mais certains touristes le demandent donc je suis obligé de proposer… »
Toucher des animaux est dangereux pour eux, et parfois pour vous. Votre crème solaire, crème hydratante ou encore votre répulsif à moustiques… sont de véritable poison pour eux. Donc pensez à eux et éviter tout contact.
Un itinéraire déjà tracé
Ensuite, après avoir raconté notre séjour dans la jungle Amazonienne où nous passions plusieurs heures à chercher les animaux, il nous a sorti les violons… Il nous explique que là, c’est pareil. Nous ne sommes pas sûr de voir des animaux. Ce qui est totalement FAUX.
Il y a quatre animaux emblématiques à voir pendant ce tour : le macaque noir à crête, le Tarsiers, le Calaos à cimier et l’ours de Sulawesi. Et vous êtes à peu près sûr d’en voir au moins la moitié, pourquoi ?
- Les macaques noir se promènent toujours dans le parc. Il n’y a pas réellement de lieu où le voir. Mais ne vous inquiétez pas, les rangers ont leur technique. Entre les tours touristiques et les rangers qui patrouillent dans le parc, ils arrivent toujours à les voir. Et quand l’un d’entre eux les a trouvé, il appelle tous ses copains et leur dit où sont les singes. C’est là que le marathon commence pour tous les groupes de touristes. Il faut que tout le monde voit les singes.
- Les tarsiers, pour eux rien de plus simple. Ils ne bougent quasiment jamais. Il y a même un panneau sur l’allée principale pour les trouver. Panneau, que d’ailleurs, vous ne verrez pas si vous êtes avec un guide. Car évidemment, il fera en sorte que vous ne passiez pas par là.
- Le Calao, c’est pareil. Il vient tous les jours quasiment à la même heure à son nid. Donc on vous fait asseoir et attendre son arrivée.
- Et enfin, l’ours. Je dirais que c’est l’animal le plus difficile à voir. Car celui là, il faut le chercher. Mais il y en a quand même quelques un dans le parc. Nous en avons vu trois. Il faut regarder à la cime des arbres. C’est là qu’il se cache.
Des animaux faussement sauvages
Et oui, malheureusement, c’est le cas dans beaucoup de lieux avec des animaux et des touristes… Les animaux sont nourris. Ils sont donc attirés par la nourriture et sont donc loin d’être réellement sauvages. Les singes sont nourris avec des bananes que les guides cachent (très mal) dans leur dos et les tarsiers, eux sont nourris avec des insectes.
Un petit résumé de notre tour du matin à Tangkoko
Nous sommes partis sur un tour d’une journée. Mais n’étant pas sûr de la qualité des tours. Nous avons préféré dire que nous faisions le tour du matin et nous déciderons plus tard de faire le tour du soir ou non.
Le marathon commence
La journée commence à 6h du matin. Dès l’arrivée dans le parc, on demande à notre guide si on peut avoir les tickets (que l’on a payé). Il nous dit que l’office n’est pas ouverte, il faudra attendre le retour. Pas de soucis, on attendra.
Ensuite, on commence à marcher tranquillement, tout en regardant les environs. Le guide, lui est devant et marche à grand pas. On accélère donc à notre tour se disant qu’il faut peut être un long chemin pour accéder à la jungle un peu plus reculée. Après 20 minutes de marche active, nous arrivons sur une jungle un peu plus dégagée. Là, notre guide s’arrête est nous montre un ours en haut des arbres. Nous sommes émerveillés.
L’ascenseur émotif
Nous râlions à propos de son rythme de marche. On se dit qu’il nous a peut être amener ici pour voir plus de choses… Et oui, en effet, c’est bien pour ça que l’on est ici. Nous prenons quelques photos et soudain, notre guide nous appelle. Il a trouvé autre chose. Nous sommes comme des enfants à Noël. On arrive sans faire de bruits. Et là, qu’est ce qu’on voit, deux macaques noirs à crête. Wouhou, on a déjà gagné notre journée ! Il y a déjà deux autres touristes et leur guide qui les observent. C’est super !
Mais, oui car il y a un « mais », quand on décide de décoller le nez de nos appareils photo et qu’on relève la tête, on a une vision d’horreur. Une horde de touristes, et c’est peu dire ! On a compté plus d’une quarantaine de touristes autour d’une petite trentaine de singes. Notre joie s’est envolée.
C’est là que Keuvin a aperçu l’un des rangers donner une banane aux singes et en cacher d’autres derrière son dos.
Des animaux pas si enjoués que ça
On assiste impuissant à cette scène surréaliste. On est censé être dans une jungle sauvage. Mais ici, il y a plus de touristes que d’animaux. Les guides poussent leurs « clients » à prendre des photos toujours plus près des animaux, jusqu’à en mettre certains sur leurs épaules. Ils sont tous avec leurs appareils photos en main à prendre des centaines de photos.
Le groupe de singe est en mouvement. Ils partent d’un côté, repartent dans l’autre. Et toute cette horde de touristes qui les suivent. Nous en faisons partis mais nous avons honte d’être ici. Au bout de 5 minutes, un guide nous voit tirer une tête de trois kilomètres de long et nous demande : « vous ne prenez pas de photos ? ». Je lui réponds en toute honnêteté que je n’aime pas ce genre de spectacle. Tout en continuant de suivre les singes qui tentent de quitter cet endroit. Je pose une question à ce fameux guide : « Vous ne pensez pas que si les singes partent quand on arrive c’est qu’ils n’ont pas envie de nous voir ? » Il me répond que peut être qu’ils ne sont pas très enjoués mais cela ne dure que 30 minutes.
QUOI ? Ce monsieur est tout à fait conscient que les singes n’apprécient guère notre présence. Mais ils le font quand même. Oui, ce n’est que 30 minutes, mais c’est 30 minutes matin et soir et ça tous les jours de la semaine. Et ajouter à ça d’autres moments dans la journée, car on peut aussi faire ces tours la journée…
Nous sommes blasés et décidons de couper court à cette mascarade. Nous demandons à notre guide de partir.
Des rangers en veux-tu en voilà…
Sur la route, pour se rendre à notre prochain stop, je discute un peu avec notre guide pour essayer d’en savoir plus. Il n’est pas très bavard. Je tente de savoir depuis quand et pourquoi il fait ce métier. Si c’est une passion ou juste un gagne-pain.
Et malgré que je n’ai pas eu de réponses exactes à mes questions. Qui d’ailleurs, pour la plupart sont restées sans réponses accompagnées d’un long silence. J’ai cru comprendre que ce monsieur est devenu ranger il y a deux ans de ça et que ensuite il est devenu guide. Car pour être guide, il faut être ranger.
Et d’après ce que l’on a pu voir durant notre séjour autour de Tangkoko, c’est qu’une grosse partie des gens qui vivent ici sont rangers et donc guides.
Prochaine étape, le nid du Calao
Et nous revoilà parti dans un périple à pas de course pour arriver à notre seconde étape, les Calaos. Notre guide avance toujours à grand pas pendant que nous traînons les pieds. On veut prendre des photos des plantes, chercher des insectes ou des oiseaux ou tout simplement profiter de marcher dans la jungle. Mais lui, s’arrête et soupir quand on avance plus…
En chemin, il nous montre tout de même, un martin pêcheur et trois chouettes. Mais on a un peu l’impression qu’il sait où vivent ces oiseaux car il fait des détours juste pour les voir. Mais ne soyons pas médisant !
Après une heure de marche, nous arrivons au pied du nid. L’oiseau arrive normalement tous les jours à 9h le matin, pour nourrir sa femelle. Malheureusement, aujourd’hui, il n’est pas à l’heure. Tous les guides sont sur le pied de guerre. Ils sont tous avec leur téléphone pour savoir si les rangers plus loin ont vu quelque chose.
Pendant ce temps, l’heure tourne. La moitié des guides et leurs « clients » ont déjà abandonnés. Nous nous avons le temps ! Nous venons déjà de passer trois heures à courir à travers la jungle donc on va prendre notre temps !
Heureusement, notre guide est dans la même optique ! Ouf, on est est enfin sur la même longueur d’onde.
Et finalement, le voilà qu’il arrive. Le Calao est juste au dessus de nous. Il est majestueux. Il ne reste plus beaucoup de groupes autour de nous. On doit être une vingtaine quand même, mais c’est toujours mieux que 40. Et là au moins, on ne dérange pas le Calao car on ne peut pas l’approcher de plus près. On essaie de profiter du moment malgré tout ce qu’il s’est passé.
Enfin, on prend notre temps !
Et après ça, notre guide prend enfin le temps de marcher à une allure raisonnable. Nous pouvons enfin profiter de la jungle. On sent quand même que notre guide n’est pas un grand connaisseur de son environnement car nous voyons presque plus de chose que lui, mais il essaie d’y mettre du sien. Nous montrons à Chloé, la petite sœur de Ninon qui nous accompagnait, les plantes que l’on connaît. On essaie de trouver des petites choses à voir. Mais bon, nous ne sommes pas des experts non plus.
Nous posons quelques questions à notre guide à propos des tarsiers. En lui demandant où vivent-il, dans quels types d’arbres etc… Il finit par nous dire qu’il va nous y amener. Il nous montre deux trois oiseaux en chemin. Et nous arrivons enfin aux tarsiers. Ils sont endormis. Il n’y a pas personnes aux environs. C’est super. On prend quelques photos et on continue notre chemin.
On voit un panneau, en sortant, stipulant que nous n’avons pas le droit de nourrir les animaux, de les toucher et d’aller voir les tarsiers en journée. Nous venons d’assister à toutes ses infractions.
Nous sommes retombés sur les singes plus loin. Mais là, il n’y a pas de rangers et de bananes, du coup les singes en ont rien à faire de nous. Et c’est tant mieux ainsi !
Nous terminons notre tour, par la visite du centre de sauvetage des tortues. Rien de bien extraordinaire. Ce n’est qu’une petite maison sur le bord de la plage avec quelques bassins en béton abritant des bébés tortues. Et enfin, nous repartons vers la sortie où nous récupérons nos tickets d’entrée pour le parc.
Notre guide s’est un peu rattrapé sur la fin du tour. Mais ce n’était quand même pas un tour aussi sauvage que nous pensions.
Une étonnante rencontre
En arrivant à l’entrée du parc, nous croisons des dizaines de guides indonésiens accompagnés d’un européen. Ce monsieur nous interpelle et commence à nous parler. Très vite, et grâce à notre « bel » accent, il commence à nous parler français. En faite, ce monsieur n’était autre qu’un français expatrié au Pérou qui travaillait pour l’ONU. Il était en visite pour voir si tout se passait bien dans le parc.
Il en a profiter pour se renseigner sur comment s’était passé notre tour. Au vu de nos réponses peu enjouées, il nous a demandé des explications. Nous lui avons parlé de la horde de touristes qui ont suivi les singes qui tentaient de partir. Il n’avait pas l’air trop surpris.
Je ne sais pas si cette rencontre a pu apporter quelque chose et à vrais dire je ne pense pas. Mais je suis ravie de savoir qu’il y a un suivi du parc.
Une petite virée improvisée le soir
Équipés de nos billets, récupérés le matin même. Nous partons à la tombée de la nuit vadrouiller dans le parc, mais cette fois sans guide. Nous passons le portique de l’entrée sans problème, il n’y a personne.
On a vu sur les cartes Maps.me qu’il y avait quelques sentiers. On a donc voulu les empreintes. Malheureusement, nous ne pouvons pas aller bien loin car le reste du parc est fermé au public pour recherches scientifiques. Même si nous ne pouvons pas aller plus loin c’est bien, ça veut dire que le reste du parc est bel et bien protégé.
On décide donc de partir se perdre dans les chemins de la zone accessible au public. Keuvin avait noté ce matin sur Maps.me et Google maps les emplacements du nid du Calao et de l’arbre à tarsiers (ils sont accessibles au public). Nous n’allons pas aller à l’arbre à tarsiers car tous les guides vont être là bas et ça risque de ne pas leur plaire de nous voir là sans guide. Mais nous nous promenons dans les environs.
La promenade se corse
Nous croisons, un, deux, trois guides… Ils nous regardent bizarrement. Puis, nous croisons un dernier. Il nous interpelle et d’un ton agressif, nous dit : « Qu’est ce que vous faites là ? Vous n’avez pas le droit d’être ici. Vous avez des tickets ? » Nous le regardons avec un grand sourire tout en lui tendant nos tickets.
Il continue son refrain : « Vous n’avez pas le droit d’être ici, c’est dangereux. J’appelle mon patron ». Son coup de fil a duré 2-3 minutes, il a parlé en indonésien et bizarrement en anglais (pour qu’on comprenne). Mais ce que l’on a vraiment compris c’est que ça ne lui plaisait pas qu’on soit près de l’arbre à tarsiers. Car on a bien entendu « tarsius » à plusieurs reprises quand il parlait indonésien.
Après avoir raccroché, le ton a changé et son discours aussi. « Je ne suis pas en colère, je ne veux juste pas que vous vous perdiez, c’est dangereux ici. Repartez sur la route principale, un ranger arrive ». Nous perdre ??? On est à 30 mètres de la route et on croise tous les 5 minutes des rangers avec des touristes… Comment peut-on se perdre ?
Bref, ce changement brutal veut tout dire : nous sommes dans notre droit mais ça ne lui plaît pas. Tanpis pour lui, on continue notre tour et on rentrera quand on l’aura décidé. Et finalement, nous n’avons jamais croisé le ranger qui était censé venir nous chercher.
Pour conclure sur le parc de Tangkoko
Voilà, comme vous avez pu le voir, Tangkoko n’a pas été un grand succès pour nous. Après chacun fait ce qu’il veut. Si vous souhaitez voir des animaux à tout prix, allez-y. Mais si comme nous, vous aimez découvrir la jungle comme elle est vraiment, c’est à dire sauvage et peut importe de voir ou non des animaux, alors passez votre chemin. Vous gagnerez du temps sur le reste de votre périple.
Nous avons fait un tour dans la jungle sur les îles Togians avec une locale (bird watcher professionnel), c’était mille fois plus intéressant et ça ne nous a coûté que 25 000 Rp chacun. On a vu aucun gros animal mais on ne s’est pas ennuyer un moment. On vous raconte ça dans un prochain article.
Tangkoko en chiffres
- 100 000 Rp par personne pour l’entrée du parc
- 200 000 Rp par personne pour une demi-journée avec un guide
- 300 000 Rp par personne pour une journée avec un guide
- 150 000 Rp par personne pour une chambre avec air con et trois repas
- 250 000 Rp pour trois personnes en taxi de Manado à Tangkoko